Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

29/04/2008

Espèce protégée

Will the circle be unbroken
By and by, lord, by and by
Theres a better home a-waiting
In the sky, lord, in the sky
(
Gospel)



En des temps si lointains que je ne puis les dater avec certitude, la planète Terre était peuplée par des extraterrestres qui l’avaient envahie et occupée. Ces derniers ressemblaient mystérieusement aux Grecs anciens, dont ils avaient adopté l’architecture et pas mal de leurs us et coutumes.
Si leur langage était indéfinissable, ils avaient toutefois emprunté certaines terminologies aux Latins. Ainsi appelaient-ils Homo Terranus, ceux que l’on nommait jadis les Terriens.
Le passe temps favori de ces extraterrestres, avait très vite été la chasse à l’Homo Terranus, si bien que cette espèce qui avait fini par vivre à l’état sauvage dans la nature, déclina rapidement. Et lorsque l’on n’en recensa plus que trente spécimens sur toute la planète, on la classa enfin « espèce protégée ». La chasse à l’Homo Terranus était donc irrémédiablement prohibée.
Et justement, en ce jours lointain, en un lieu que l’on peut appeler LA CITÉ, se tenait le procès d’un citoyen qui avait transgressé la loi, et  tué un Homo Terranus avec son arbalète.
Dès son arrestation, pour sa défense, il avait prétendu que l’Homo Terranus l’avait menacé, tandis qu’il chassait le canipiot, une forme mutante de chien à douze têtes et quarante-huit pattes.
Mais des défenseurs de l’environnement s’étaient emparés de l’affaire, et comptaient bien faire condamner sévèrement le hors la loi.
Ils devaient être déçus. En effet, lors de son procès, le tueur d’Homo Terranus clama combien il avait eu peur lorsque, au détour d’un fourré, il était tombé nez à nez avec un spécimen particulièrement féroce. Et alors, l’avocat de la défense partit dans une plaidoirie vibrante, où il s’efforça de démontrer que son client n’avait fait que préserver sa vie.
Cet argument fut entendu, et le contrevenant relaxé.
Au sortir du Tribunal Suprême, de jeunes citoyens allèrent consulter Zorga, un patriarche immortel, qui était assis au soleil, en haut des gradins du Temple de la Clairvoyance.
Les jeunes citoyens lui demandèrent ce qu’il pensait de la décision de justice qui venait d’être prononcée, et Zorga répondit de sa voix douce :
— Rien de bien. Car je me souviens qu’il y a de cela très longtemps, un Terrien, comme on appelait alors un Homo Terranus, avait tué l’un des derniers spécimens d’une espèce protégée. Il avait été jugé après cela, et relaxé comme le citoyen d’aujourd’hui. Seulement, si j’use de ma mémoire infra temporelle, je ne puis que constater que l’Homo Terranus tué récemment, était le très lointain descendant de celui qui avait lui aussi mis en péril une espèce protégée.
Puis le Sage se tut, et un jeune citoyen demanda :
— Grand Sage, que peux-tu en déduire ?
Le Sage soupira :
— Qu’un jour, arriveront sur cette planète des créatures qui s’en prendront à nous, comme on s’en est pris à l’Homo Terranus. Et peut-être qu’ainsi, le cercle finira par être brisé.
— Le cercle ? s’étonna le jeune citoyen.
— Oui, le cercle, celui qui unit les composantes de l’univers, qui relie les générations et les espèces, qui tisse le grand équilibre fondamental. Que deviendra le monde lorsque le cercle sera brisé ?
Les jeunes citoyens se retirèrent, comprenant que le Sage avait besoin de méditer.
Cette nuit-là, il demeura en haut des gradins du Temple de la Clairvoyance, à contempler un cercle lumineux qui semblait danser dans un ciel dégagé. Son regard était inquiet, car avant même que ses yeux n'aient pu les voir, ses oreilles avaient perçu l’arrivée de milliers de petits engins, qui fondirent bientôt sur la Terre.

Patrick S. VAST - Avril 2008

Commentaires

Belle imagination sur une transposition qui pourrait être d'actualité, bravo, et toujours belle plume !

A+ JCP

Écrit par : Jean-Claude | 30/04/2008

Les commentaires sont fermés.